2. Valeurs et notions communes à toutes ces pédagogies alternatives

Ce livre ci-contre est, de notre point de vue, une référence.

Son auteure retrace les valeurs transmises par une foule de pédagogies alternatives qui font l’unanimité chez beaucoup d’enseignants et de parents.

Les expériences tentées ici ou là le démontrent, y compris au sein de l’éducation nationale.

On retrouve globalement dans chacune de ces expériences éducatives alternatives les mêmes notions, les mêmes principes directeurs qui ont fait leur succès.

Nous allons vous les présenter dans leurs grandes lignes afin de bien montrer en quoi et comment elles se démarquent de l’école publique même si d’autres critères doivent être pris en compte avant de les comparer (et notamment les moyens mis en œuvre et l’effectif de chaque classe) à l’enseignement classique de l’école publique.

Point commun central : rechercher des pédagogies efficaces basées sur des valeurs qui nous relient, qui nous transcendent et qui sont plus proches de l’évolution que nous voyons naître chaque jour autour de nous.

Dans l’enseignement en primaire, en collège ou à la maison :

Ces pratiques auront toutes comme point commun d’être très centrées sur l’enfant pour favoriser au maximum dans la joie :

  • son autonomie,
  • sa liberté et son espace d’apprentissage,
  • son autodiscipline,
  • sa créativité,
  • son émancipation
  • et, in fine, son épanouissement dans la découverte de la vie et de ses enjeux notamment en matière d’environnement et d’intégration dans la société.

En fait, on découvre vite qu’il ne s’agit pas de choisir entre telle ou telle pédagogie alternative mais bien, à l’inverse, de centrer tous les outils pédagogiques dont on peut disposer autour d’un enfant pour qu’il rayonne d’envie d’apprendre… ou pas, chacun à son rythme !

Cette vision est, il faut bien l’avouer, très éloignée de l’enseignement vertical officiel actuel qui, eu égard (encore une fois !) au nombre d’élèves à gérer, prône :

  • le tri par classe d’âge,
  • un référentiel précis et bien délimité,
  • complété par une progression à suivre durant l’année scolaire,
  • des notes pour valider les acquisitions,
  • des livres et cahiers d’exercices…
Dans l’enseignement en lycée ou dans les classes supérieures :

La pédagogie sera plus axé sur une grande liberté d’apprentissage (plus d’autonomie grâce au numérique), la coopération entre apprenants, une plus grande responsabilité dans l’organisation des activités et une pédagogie axée sur des jeux (adolescents comme adultes en entreprise) pour favoriser une grande intelligence sociale et une capacité à aller de l’avant notamment dans la réalisation de projets.

Quelques valeurs fondamentales communes et partagées :
1. La reliance :

Toutes ces pédagogies recherchent constamment à « relier« , à créer des liens entre les apprenants et les savoirs, à identifier les besoins en « lien », en accord avec le désir de répondre à une attente. Si ce lien n’existe pas, le désir d’apprendre n’existera pas non plus, l’épanouissement et la joie (intérieure ou extérieure) non plus… Il est donc logique que cette volonté soit nécessairement à l’initiative de l’apprenant.

D’ailleurs Antonella Verdiani souligne dans son livre (page 55) qu’éduquer dans la joie signifie éduquer à la « reliance » car l’étymologie sanscrite du mot « joie » est « d’unir l’âme individuelle avec l’esprit universel ». Cette dimension de « relier » dans la pédagogie est donc essentielle car elle revient à unir de manière sacrée un élève (ou plutôt son « âme » c’est à dire son aspect sacré, divin) et tout un univers que d’autres côtoient déjà et l’attendent impatiemment. Et il est plus facile de le faire si l’élève choisit lui-même ses matières de prédilection, celles où il est plus à même de prendre confiance en lui (parce que plus enclin et doué naturellement à cela). La joie dégagée par ce choix permettra ensuite de motiver l’élève vers d’autres disciplines où il pourra encore plus progresser.

Une fois la connexion établie et en fonction de son intensité, le sentiment de joie apparait et contribue à  renforcer un état serein, détaché, abouti et propice à permettre à l’élève de dépasser tous les obstacles inhérents à tout apprentissage comme la timidité, la turbulence, le manque de concentration, de mémoire…

2. La dimension spirituelle :

Quel que soit notre âge, consciemment ou inconsciemment, dès que l’on recherche un développement personnel, l’amélioration d’un situation, un mieux dans un domaine qui nous touche particulièrement notamment s’il s’agit de changer notre vision de soi, du monde, des autres pour être plus compétent, pour bonifier notre caractère, notre rapports avec autrui, nous parlerons de développement spirituel.

Et cette quête n’est pas l’apanage des religions ! Oh Dieu non ! C’est pour cette raison que nous ajoutons l’adjectif « laïque », pour éviter toute confusion.

Ainsi, nous pensons que ces pédagogies alternatives désirent intrinsèquement mettre en œuvre et faciliter l’épanouissement de chaque apprenant dans des relations basées sur des valeurs qui respectent ce développement spirituel donc dans l’amour, la paix, la non violence, la droiture, le respect… N’est-ce pas là le but ultime de toute éducation, accompagner tout apprenant dans un « processus de connaissance de soi » ?

Ceci étant, l’enseignement pratiqué ne doit pas éluder les questions que posent souvent des enfants sur la vie, son but, la mort… avec toute la prudence et la retenue qui s’imposent pour n’imposer aucune doctrine ni dogme (notamment religieux !).

3. Les atouts de l’interdisciplinarité :

De la même manière que la réforme des collèges (entrée en vigueur en septembre 2016) veut intégrer plus d’interdisciplinarité à travers ses E.P.I. (Enseignements Pratiques Interdisciplinaires), un enseignement qui facilite les échanges entre disciplines permet une meilleure compréhension et approche de la réalité.

En fait, le savoir ne gagne pas à être divisé, scindé, cloisonné pour éviter que les apprenants perdent la vision globale que doit avoir la connaissance d’une manière générale.  Par exemple, un apprentissage à partir de séquences de vie (par exemple au cours d’examens à l’extérieur d’animaux, de plantes, d’artisans qui travaillent…) apporte une vision dans laquelle l’école est un « système global vivant » et doit être appréhendé de cette manière plutôt que d’appréhender chaque matière ou domaine relatif aux situations rencontrées.

Elle permet d’en varier le contenu, d’en faciliter des échanges et les imprévus, d’intégrer plus de jeux et de varier les approches pédagogiques tout en limitant, spirituellement, le sentiment de « séparativité » souvent très bien ancré aujourd’hui dans nos consciences et selon lequel nous sommes bien différents de l’autre, comme « séparés » et régis par des lois différentes. Ce sentiment est très dangereux et va à l’encontre de la dimension spirituelle dont il a été question ci-dessus. Il est alimenté quotidiennement, dans toutes nos pensées, actes et paroles par un égo qui n’a de cesse que de comparer, critiquer jalouser… bref nous isoler des autres ! Prôner au contraire une vision globale (en analyser tous les différents angles) incite à la compréhension, à la tolérance, le respect, la sagesse, l »empathie et l’unicité.

Cette approche est valable quel que soit le niveau pédagogique mais reste primordiale en primaire, en collège mais aussi au lycée pour l’individu, la société et la nature ne fassent qu’un.

L’enseignement supérieur qui doit dispenser des matières bien plus spécifiques et pointues peut aussi, même si c’est dans une moins large mesure, intégrer des études de cas transdisciplinaires pour mieux intégrer tous les aspects souvent contradictoires mais complémentaires d’une même problématique.

4. La novation :

Toutes ces pédagogies apportent quelque chose de nouveau, de novateur, un potentiel de rupture et de transgression par rapport au système éducatif classique. Elles peuvent déranger, surprendre mais aussi enthousiasmer et déchaîner des dynamismes propres à se poser des questions, à se repositionner, qu’on soit parents ou éducateurs. Tout changement fait peur surtout au début car il exige une analyse, un dépassement de soi et de ses convictions, de ses repères : comment réussir en laissant autant de libertés aux élèves, sans notes, vont-ils réellement apprendre ?

Tout changement de paradigme implique de lâcher prise notamment sur :

  • le principe d’autorisation cher à l’éducation classique et au pouvoir sous-jacent de chaque apprenant qui en découle : il peut apprendre autant de ses élèves et doit se repositionner dans cette chaîne éducative. Chacun interagit avec l’autre qu’on soit élève ou éducateur dans une libre initiative et en totale autonomie,
  • le principe d’incertitude prônée par Edgar Morin dans ses 7  savoirs  nécessaires  à  l’éducation  du  futur (en 2000) : tous les objectifs à atteindre ne le seront pas forcément car la connaissance peut véhiculer des « erreurs » et des « illusions ». Il faut réintégrer du scepticisme dans nos apprentissages, reconnaître la complexité du monde qui nous entoure comme le montre l’écologie qui réunit beaucoup de disciplines pour comprendre et protéger nos écosystèmes ou la permaculture qui a, de la même manière, une approche très systémique, globale, éthique et durable en énonçant toutes les pratiques de l’agroécologie associées aux méthodes de conception d’habitations respectueuses de notre environnement ou à celles de production d’énergies renouvelables. Toutes ces techniques forment un tout indivisible complexe où tout fonctionne en boucle.